Cette fois encore je suis allé à Rétromobile le cœur léger. Ici, pas besoin de la liste des pièces que je recherche ni de mon pied à coulisse. Ici, comme la grande majorité des visiteurs, je viens pour rêver. Une des attractions de l’année était sans conteste la réunion de trois Bugatti Royale. J’ai été heureux de découvrir la réplique du roadster Esders, magnifiquement réalisée. Le premier moment d’émotion passé, j’ai toujours le même malaise devant les répliques, si fidèles soient-elles, mais je dois bien admettre que dans la mesure où l’authentique roadster Esders a été recarrossée en coupé chauffeur moins spectaculaire, il s’agit ici du seul moyen de faire revivre le chef d’œuvre de Jean Bugatti. Autre exposition rarissime, la réunion sur un stand de plus de 10% de la production totale de la marque Pegaso. Une magnifique synthèse, admirablement documentée, de l’activité de Wilfredo Ricart qui a su, avec seulement 84 voitures produites, se hisser au niveau des plus grands. Très impressionnant, le char Tigre allemand, recordman toutes catégories : 70 tonnes, moteur Maybach de 24 litres et 700cv, dont la consommation, qui se situe entre 6 et 10 litres au… kilomètre. De quoi laisser plus d’un visiteur perplexe. Un grand coup de chapeau aux constructeurs français qui font revivre chaque année des modèles en passe d’être oubliés et des prototypes parfois inconnus qui ne laissent personne indifférents. Alors que certains regrettent de ne pas les avoir vus dans la rue, d’autres comprennent pourquoi… Bravo aussi aux clubs qui en alliant pure passion et voitures en superbe état, nous rapprochent un peu plus de la réalité du terrain. Trop peut-être pour le club Volvo qui exposait un break 850, certes en très bel état, mais loin d’être un grand représentant de la marque suédoise. Mais le summum de la passion se trouvait concentré sur le petit stand où Dirk et Trudy Regter exposaient la Ford T avec laquelle ils arpentent le monde à des fins caritatives. Près de 100.000 kilomètres d’aventures et de découvertes, enfin une voiture qui roule, et elle est centenaire ! De nombreux marchands proposaient comme à l’habitude de très belles voitures à des prix très élevés, mais dans certains cas le calcul méritait d’être fait : Amener dans cet état une Aston Martin, une Maserati ou une Lamborghini pantelante ne serait pas gratuit non plus et vous prendrait beaucoup de temps, et comme la banque ne rétribue plus votre capital… D’autres cas me laissent plus perplexe, telles ces Mercedes 300SL proposées en (trop) grand nombre. Un nid ? un stock de pièces ? des “refabrications” authentifiées ? Tout est possible, mais une chose est certaine, à 1,5 million d’euros, mieux vaut bien se renseigner. J’ai gardé pour la fin l’énorme vente aux enchères d’Acturial, dont l’événement de l’année est sans conteste la vente de la collection Baillon, largement médiatisée. Celle-ci ne devrait pourtant pas occulter le panel incroyable de voitures d’exception proposées à la vente. On peut bien sûr se poser les même questions que pour les véhicules vendue par les marchands, à la différence près qu’ici le prix est élastique et que le “jeu” ne doit pas faire oublier les frais. Pour la collection Baillon, mis à part la Ferrari et la Maserati en bon état général, on notera des adjudications exceptionnelles pour d’authentiques épaves, certes de grandes marques. Rêve d’enfance, investissements hypothétiques, plan de vie ? Je pense qu’il faut un peu de tout cela, additionné d’un brin d’irréalisme, pour débourser 1,7 million d’euros pour une Talbot Saoutchik rongée par la rouille. Enfin, les vendeurs, les acheteurs, les visiteurs ressortent content, c’est le principal… et merci à Rétromobile !
JB
Vidéo: Michèle Douffet, photos: Michèle Douffet et Jacques Bougnet