La Wimille, un rêve trop vite orphelin…
L’idée de créer sa propre voiture a germé dans la tête de nombreux concepteurs souvent géniaux, mais les chances de réussite, malheureusement, sont devenues bien plus minces qu’au début du siècle, une triste réalité qui coupa les ailes à plus d’un. Avec les Grégoire, Claveau, Tucker et autres, la Wimille fait partie de ces occasions manquées.
Imaginée pendant la guerre par le célèbre pilote français Jean-Pierre Wimille dessinée juste à la libération avec l’aide de Leygonie et Viel, le premier prototype fut présenté le 9 juin 1946 à l’occasion du Grand Prix de l’Autoroute de l’Ouest.
La voiture était très originale: châssis tubulaire, moteur longitudinal arrière, ligne ovoïde offrant un excellent CX. Sa particularité la plus étonnante était sans conteste ses trois sièges frontaux avec le volant au centre. Une autre particularité aurait dû être un moteur V6 de 1500cc mais il n’était pas encore au point et la première voiture était animée par un moteur de Traction 11cv, accouplé à une boîte électromagnétique Cotal.
La voiture n’avait bien sûr pas que des qualités et certains points tels que l’absence de coffre, les vitres latérales fixes et la visibilité arrière nulle demandaient à être sérieusement repensés.
Jean-Pierre Wimille entreprit la construction du second prototype en 1947 après avoir passé un accord avec Ford Poissy. La voiture utilisait donc un maximum de pièces Ford ce qui explique que sa motricité soit confiée à un V8 Vedette de 2158cc. Le styliste Philippe Charbonneaux dessina une carrosserie plus jolie et plus fonctionnelle, réalisée par le carrossier Faget-Varnet. La voiture fut présentée au salon de Paris 1948.
La mort de Jean-Pierre Wimille lors des essais du Grand Prix de Buenos-Aires de 1949 rendit la voiture prématurément orpheline. Les collaborateurs décidèrent de continuer le projet et commencèrent par apporter quelques modifications mineures au prototype numéro 2 qui hérita principalement d’une nouvelle face avant garnie d’un phare. C’est dans cette configuration qu’il participa au concours d’élégance du Bois de Boulogne en juin 1949.
Le troisième et dernier prototype fut exposé par le carrossier au salon de Paris 1950. Son empattement était réduit de 6 cm et il était équipé d’un moteur plus puissant développant 66cv. Une série de plusieurs centaines d’exemplaires était prévue, mais Ford-France jugeant que cette voiture risquait de nuire à son projet Comète, refusa de fournir les pièces nécessaires. Ce fut le coup de grâce et le projet fut définitivement abandonné.
Les prototypes 1 et 3, exposés pendant de longues années au Musée de Saint-Dizier par Philippe Charbonneaux, sont les derniers témoins de cette trop courte aventure.
Jacques Bougnet
Caractéristiques techniques:
Moteur central longitudinal 4 cyl en ligne de 1911cc donnant 56cv à 3800tr/min (proto 1) puis V8 de 2158cc, 60cv à 3800tr/min (proto 2) et 66cv à 4500tr/min (proto 3). Embrayage à disque sec.
Boîte électromagnétique Cotai à 4 vitesses. Transmission directe aux roues arrière. Freins à tambours hydrauliques. Suspension à 4 roues indépendantes et ressorts hélicoïdaux. Direction centrale, à vis. Pneus : 5.50x15. Réservoir d’essence de 58 litres (proto 1) puis 65 litres.
Dimensions: voies 135cm, empattement: 270cm (protos 1 & 2) puis 264cm (proto 3). Longueur: 450cm (protos 1 & 2), 444cm (proto 3) largeur: 170cm, hauteur : 140cm. Vitesse : 150km/h (proto 1) 165km/h (protos 2 & 3).